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ET SI LA NATURE POUVAIT CRÉER LES DRAGONS ?
Pourquoi les Vikings avaient-ils sur leurs drakkars une figure de proue à l’effigie des dragons ? Pour leur vitesse, leur témérité, leur intelligence du combat et la terreur qu’ils inspirent… Les guerriers du Nord se voyaient ainsi. Mais pas seulement eux. Partout sur la planète, dans pratiquement toutes les cultures, les dragons ont fleuri. C’est la culture chinoise qui le place au zénith comme principe mâle du Yang (à place égale avec le tigre). Évoqué par Hérodote ou Aristote, élément important des aventures du roi Arthur et de Merlin l’Enchanteur, le dragon est devenu un personnage incontournable des oeuvres fantastiques, livres ou films. On peut même savoir par exemple comment élever un dragon, tout connaître de la dragonologie. Nombre de ces héros sont télépathes et très intelligents, certains sont malfaisants, d’autres bienveillants…
Avec une telle universalité, aussi ancienne, les dragons ne seraient-ils que des vues de l’esprit, une allégorie des volcans et des démons de l’enfer, des reptiles vus à l’aune de la sardine de Marseille ? Mais la nature aurait-elle tout de même pu par le passé créer des dragons. En a-t-elle les moyens ? En reste-t-il des traces aujourd’hui ? On a cru en retrouver une trace fossile en Roumanie en 2010. Baptisé « dragon trapu », ce n’est en fait « qu’un » dinosaure. En 2015, c’est en Chine qu’est découvert un dinosaure avec une tête de dragon et des ailes faites de grandes plumes lui aussi apparenté aux vélociraptors. Mais il ne pouvait sans doute pas voler et encore moins cracher des flammes. En ce qui concerne ce qui vit encore, une région montagneuse de Slovénie est célèbre pour la présence d’oeufs dits « de dragons » dans une grotte de Postojna. Ces larves ressemblent effectivement comme deux gouttes d’eau à des bébés dragons. Mais ce sont, sans leur manquer de respect, juste des salamandres blanches (des protées anguillards). Mis à part leur aspect, leur seul point commun avec leurs mythiques aînés est leur longévité (une centaine d’années). Du côté des reptiles, il existe des petits lézards volants, ou plutôt planant. Vivant en Indonésie et en Asie du Sud-Est, ils possèdent une membrane reliant leurs pattes, un peu comme celle de certains écureuils. Sur l’île de Komodo, qui fait partie des îles de la Sonde en Indonésie, les plus gros reptiles vivants sont appelés dragons de Komodo. Ces varans ont une salive riche en bactéries toxiques, très acide, légèrement venimeuse, mais qui est loin d’égaler un bon cracheur de feu. Sans parler de leur cruel manque d’ailes. Ces varans sont tout de même exceptionnels : ils mesurent en moyenne de 2 à 3 mètres pour un poids d’environ 70 kg.
Victoire de l’imagination humaine
Question cracheur de feu, les exemples sont, dans la nature, encore plus rares. Il existe une espèce de cobra cracheur de venin jusqu’à 3 mètres, dangereux pour les yeux. Pour trouver mieux, il faut changer de branche et passer chez les insectes. Car la palme d’or revient à un scarabée de 2,5 cm environ. Et il utilise le feu. Vraiment. Son abdomen, orientable à 170°, projette avec force bruits explosifs un liquide corrosif porté à ébullition.
C’est que le scarabée-bombardier (quelque 500 espèces) a de nombreux prédateurs et doit par exemple effrayer les redoutables hordes de fourmis. Son dispositif étonnant et détonant est particulièrement complexe. Un peu comme un moteur de fusée. L’insecte a une poche spéciale où il stocke deux composés chimiques hautement réactifs, le péroxyde d’hydrogène et l’hydroquinone. Normalement, quand ils se mélangent, cela fait « boum ». Mais la bête pas bête a concocté un inhibiteur, une substance qui empêche l’explosion. Le moment venu, quand il faut se défendre, elle fait passer le mélange liquide dans une chambre de combustion où se trouve un anti-inhibiteur puis le jet de feu est expulsé par deux tubes « d’échappement », vers l’extérieur.
Les dragons ont eu chaud. La nature possède donc bien, effectivement, en ordre dispersé, toutes les pièces pour en fabriquer. Mais rien ne prouve pour autant qu’ils n’aient jamais existé. À défaut, ils représentent une saisissante victoire de l’imagination humaine. Et qui sait si un jour ou l’autre…
Source : Le figaro
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